mardi 6 février 2007

VOYAGES : RODRIGUES PART ONE


Ma première rencontre avec Yann Colas remonte au 13 août 2004, souvenir d’une belle journée de pêche à la Réunion en compagnie de Joël Le Guen sur Abaco…Au départ de Saint Gilles nous avions touché trois marlins noirs : 1 décroché, 1 embarqué et une casse sur un grand poisson qui nous gratifia (beau joueur) d’une superbe chandelle au bateau. On entre en pêche comme on entre en religion…Mon baptême salin eut donc lieu ce jour d’été, je me permets cette précision pour faire savoir que l’auteur de ces lignes est encore bien vert.

Avril 2006, Yann nage désormais de ses propres nageoires et le sillage qu’il trace du côté de Rodrigues est auréolé d’une bonne et belle réputation, un vent nouveau s’est levé dans le Sud…Il porte un prénom et un nom qu’on imagine lointainement enracinés en la terre des kers et autres chimères de granit.

En ce qui me concerne depuis 2004, c’est morne plaine…Dame Chance est aux abonnés absents. Mon épouse Fanny et moi même, avons labouré les eaux de Maurice et de Madeire, avec pour seul succès un prélèvement, certes ludique mais néanmoins répétitif au sein des bancs de bonites.

Il est néanmoins une grande source de satisfaction à ce tableau halieutiquement discutable (et discuté, je m’en porte fort) : Notre rencontre à Madeire avec Peter Bristow, figure mythique de notre sport.
A ce titre, je ne peux que trop conseiller, la lecture du superbe ouvrage récemment publié aux éditions Bimini Twist « Living Legends of Big Game Fishing », au fil de ces pages le lecteur découvrira de merveilleux récits de pêche racontés par une dizaine de ces fameuses « légendes vivantes » : Peter Bristow, Peter Wright, Bart Miller, Dennis « Brazzakka »Wallace…

Pour en revenir à notre propos, la décision est donc arrêtée en février 2006 de planifier un nouveau voyage dans l’hémipsphère sud. Ce sera donc Rodrigues avec Yann Colas à bord de Black Marlin, magnifique 50 pieds construit à Maurice, nous y reviendrons.

Afin de me prémunir d’une nouvelle bredouille, je suis également décidé à essayer le jig…Sésame semble t-il miraculeux qui saurait prémunir des caprices de la sus citée Dame, jusqu’au plus guignard d’entre nous.

Nous voilà dans l’avion, nous emportons :2 Normic 80 lbs talon coudé, 1 Smith Nirai 55, 1 Stella 20000, 2 Tiagra 80 lbs…Quelques leurres et jigs viennent ajouter au supplément bagages : Illand, Moldcraft, Catch It, Williamsson et pour finir une arme secrète, un Joe Yee Medium plunger monté par le Capt Bristow en personne.

1er avril (cela ne s’invente pas) regards sur Rodrigues depuis le hublot de l’ATR, l’océan convoque l’ensemble de la palette des bleus pour nous accueillir : la vie comme la mer est belle !

Nous sommes accueillis par Alain Colas (le papa de Yann), avec qui j’ai planifié ce voyage via une armada de mails! Le temps est superbe, des pluies torrentielles (phénomène rare à Rodrigues) ont touché l’île il y a peu, ce qui ajoute le vert au bleu.

Alain nous propose de passer au ponton. Après une agréable route, Yann, le sourire aux lèvres, nous souhaite la bienvenue à bord de black Marlin…Le bateau est beau très beau même ce qui ne gâche rien, ensuite il est spacieux et parfaitement équipé, enfin entre les mains de Yann il devient une extraordinaire plate-forme de pêche bénéficiant d’une tenue de mer réellement impressionnante.

Deux premiers jours en mer avec une nuit à bord, nous allons pêcher le tombant ainsi que quelques spots secrets que Yann a minutieusement répertorié depuis qu’il est basé à Rodrigues. L’ouverture des hostilités est proclamée par un wahoo qui attaque un Sea Searcher…Beaucoup d’autres suivront, 10 heures 30, le tangon de la 130 claque : Marlin ! Au bout d’une demie heure, nous embarquons un beau black de 120 Kg...piqué profondément au dessus de l’œil droit. Un an et huit mois et maintenant qu’il est là vaincu, je me trouve hésitant, un peu gauche en une frontière entre joie et tristesse.

Le chant des moulinets ne cessera plus…wahoos, thons dents de chiens, thons jaunes, dorades, rainbow runner...traîne, bonite coulée, bonite à flapper…Les techniques se suivent pour mon plus grand bonheur. Cette première journée est au-delà de nos espérances.

La nuit tombe en un couché de soleil dont la magnificence ne saurait être racontée au travers de ces lignes…Yann me propose de traquer le plus beau des poissons…Nous eschons deux beaux calmars que nous faisons descendre à environ 40 mètres de profondeur…Hélas après une touche soyeuse qui nous fit espérer la présence de seigneur Xiphias…Nous devrons nous « contenter » d’un pointes blanches.

Nuit à bord, après un petit-déjeuner délicieux nous repartons en traîne, aussitôt le manège reprend avec de gros wahoos, suivi par une explosion du tangon tribord…J’espère un marlin, mais nous embarquons un beau yellowfin qui devait arriver en marche inverse pour faire claquer le tangon avec une telle force !

Nous repartons, alerte générale 3 voiliers attaquent les leurres…Dont un poisson bleu électrique qui s’agace sur le leurre du tangon tribord. Nous ne parviendrons pas à les faire mordre mais embarquerons un beau sail de 40 kg moins d’une heure plus tard…Je suis au paradis, Fanny immortalise ces instants.

Fin de journée, retour à Port Mathurin…Bilan de ces 2 premiers jours : pas loin de 500 kg de poissons !

Certes l’océan est ici incroyablement poissonneux, cependant c’est surtout Yann qui au travers de sa parfaite connaissance de la zone et la maîtrise absolue de son navire contribue à cette pêche miraculeuse.

Troisième jour, Fanny est restée à terre…Nous faisons moisson de wahoos et subissons un décroché sur un gros bleu d’environ 200 kg qui nous gratifie d’un splendide spectacle à 200 mètres du bateau. J’étrenne également ma canne de Jig et me brise les reins sur les carpes rouges, mais le bonheur est là et bien là.

Quatrième et dernier jour, Fanny est à nouveau à bord…Ni Yann ni moi ne le savons encore, mais Dame Chance marche dans ses pas. En cette journée bénie des Dieux, nous toucherons six marlins. Un énorme bleu estimé par Yann à 400 kg ouvre le bal. L’immense poisson remonte tranquillement au milieu des leurres, passant de l’un à l’autre, pour finalement jeter son dévolu sur un Black Hole, le tiagra hurle à la mort…Suprême offrande, le marlin a choisi ma canne, la traction est formidable, j’ai beaucoup de fil dans l’eau et pompe autant que je le peux puis soudain plus rien, nous pensons à un nouveau décroché alors que je ramène facilement la ligne mais voilà qu’à nouveau le fil se tend, puis sort à pleine vitesse du moulinet qui tourne comme une turbine de réacteur, Fernaud l’arrose abondamment car la mécanique chauffe dangereusement.

La lutte s’installe, Yann fait pivoter le bateau pour modifier l’angle de traction et déséquilibrer le prédateur, la manœuvre s’avère payante le fil rentre à nouveau sur la bobine, la sueur me brûle les yeux la Normic ploie, j’ai du mal à maintenir la coordination de mon pompage…Yann décide avec mon accord d’engager la marche arrière plein gaz, l’eau s’engouffre dans le cockpit.
Le marlin saute à 100 mètres derrière le bateau, un instant d’éternité entre ciel et mer…Il déchire l’horizon en une démonstration de force primale…Je ne sais pas trop lequel de nous deux tient l’autre…Hélas au bout de 45 minutes de combat, le fauve retombe sur la ligne de 80, c’est la casse. J’ai encore beaucoup à apprendre.

Deux autres bleus suivent (entre 90 et 110 kg), ils seront taggés et relâchés, je m’accorde le plaisir de combattre en stand up, rassuré par la stabilité de Black marlin. Deux autres décrochés, dont un tout petit black que nous sommes presque heureux de voir se libérer en une belle cabriole.

L’après-midi touche à sa fin…le tangon bâbord claque, un premier rush puissant mais bref : Marlin ! Le Joe Yee a piégé l’Empereur…Un beau combat en puissance, le poisson se cale sous le bateau et pèse de tout son poids…Nous embarquons un Black de 372 livres et rentrons doucement vers Port Mathurin des images plein la tête, je suis immensément heureux, mes pensées vont à M. Clostermann qui nous a quitté quelques semaines plus tôt.

Je tiens à remercier Alain, Annie et Clarine (l’équipe à terre) pour leur gentillesse et l’accueil réservé…Nono, Fernaud, Tok (les marins) pour leur bonne humeur, leur enthousiasme et Yann bien sûr qui a plus que rempli son rôle de garant du rêve (il comprendra). Enfin Fanny la Chance ma si patiente et dévouée épouse sans qui rien ne serait possible.

Épilogue : mi-avril, j’adresse un nouveau mail à Alain…Arrivons à Rodrigues le 7 juin 2006 pour 4 jours de pêche.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Récit très sympa et qui augmente encore mon impatience de découvrir cette ile et cette organisation de peche !(départ le 26 mars prochain)
Bonne chance pour juin !